Le Tchad a annoncé qu'il participerait à hauteur de 3 millions d'euros et plusieurs autres pays, comme la France, la Belgique, les Pays-Bas et la Suisse sont également prêts à soutenir financièrement le Sénégal. Mais on est loin du compte alors que, côté sénégalais, on exige le versement de la totalité de l’argent budgétisé, sans compter le casse-tête juridique que constitue l’affaire Habré.

Nicolas Sarkozy a, selon la presse française, dans une lettre récemment adressée à Abdoulaye Wade, rappelé à ce dernier qu’il ‘attache, de même que l'Union africaine et de nombreuses Ong, une grande importance à la tenue du procès d'Hissène Habré’. Pour sa part Me Wade a réaffirmé la position de son gouvernement, à savoir ‘l’exigence d’un financement complet’. Dans le journal espagnol Público en date du 14 octobre 2008, le chef de l'Etat sénégalais conditionnait déjà la tenue du procès à son financement par la communauté internationale. Me Wade dira, en outre, qu'il ‘n'est pas obligé de juger’. L'Union européenne a déjà débloqué 2 millions d'euros pour la phase initiale de l'instruction, mais elle attend depuis plus de deux ans que ‘le Sénégal présente une proposition budgétaire raisonnable’, selon Human Rights Watch. Le Tchad a annoncé qu'il participerait à hauteur de 3 millions d'euros et plusieurs autres pays, comme la France, la Belgique, les Pays-Bas et la Suisse sont également prêts à soutenir financièrement le Sénégal, rappelle l’Ong des droits de l’Homme. La totalité des fonds pour le procès est estimée à 27,4 millions d'euros. L’Ue attend toujours un budget ‘crédible’. Est-ce la raison pour laquelle, la somme attendue n’est pas versée ?

On souligne que, selon la pratique internationale, le financement de ce type de procès est réalisé par étapes, année après année. Côté sénégalais, on exige le versement total de l’argent, après avoir modifié la Constitution pour juger Habré. Or les sommes déjà versées ou promises sont loin des espérances des autorités sénégalaises. Et il s’y ajoute que l'Union africaine n'a pas répondu à l'appel. Pourtant elle a, elle-même, refusé de donner suite à une demande d'extradition formulée à l’encontre d’Hissène Habré par la justice belge, en mandatant le Sénégal de lui organiser un procès équitable.

Me Abdoulaye Wade, présidant le 10 janvier 2007 la rentrée solennelle des cours et tribunaux, avait lancé aux magistrats sénégalais : ‘Administrons à la face du monde la force éclatante de la justice sénégalaise. La seule solution pour le Sénégal consiste à juger sur son sol’ l'ancien chef de l'Etat tchadien, concédera-t-il aux magistrats, en précisant cependant que ce procès ne sera organisé que ‘si l'instruction conclut en ce sens’. Le chef de l’Etat avait appelé la magistrature sénégalaise à ‘remettre en cause’ ses méthodes de travail dans le but d'organiser au Sénégal ce procès qu'il a qualifié de ‘défi redoutable’. Double défi, disons-nous, sur le plan juridique comme financier. Il y a bien eu une évolution dans la position wadienne sur l’affaire Habré. En effet, c’est lui-même qui avait déclaré en 2001, en pleine tempête politico-judiciaire autour de cette affaire, que sous sa présidence, Hissène Habré ne sera jamais jugé au Sénégal. Le dimanche 2 juillet 2006, à Banjul, le Sommet de l’Union africaine a finalement convaincu le Sénégal de juger Habré accusé d'avoir commis des assassinats et des tortures sur près de 40 000 personnes, selon ses détracteurs. La décision du 2 juillet 2006 de l'Ua qui donne mandat au Sénégal de juger Habré, prévoit ‘d'apporter au Sénégal l'assistance nécessaire pour le bon déroulement et le bon aboutissement du procès’. Seulement, l’Union africaine n’a pas respecté ses engagements, surtout financiers, à l’endroit du Sénégal.

Me Wade qui sait que les Sénégalais sont très partagés sur l’organisation du procès tant attendu en Occident, dira par ailleurs : ‘Je ne suis pas obligé de juger Habré.’

El Hadji Gorgui Wade NDOYE (ContinentPremier.Com)