Hollande et DébyLa situation qui prévaut actuellement en République Centrafricaine est probablement la matérialisation la plus palpable de l’expression militaire, selon laquelle « c’est le terrain qui commande ». Concrètement, cela signifie que chaque opération peut avoir des données de terrain indépendantes de celles qui étaient prévues par la hiérarchie planificatrice. Dans le cas de la RCA, cela est surtout relatif au rapport en perspective, entre les troupes françaises de l’opération Sangaris et celles de la Misca, dont la tête de pont demeure les soldats tchadiens.

Par extension, cette opposition sur le terrain débouche sur un subtile bras-de-fer entre François Hollande, représentant de la communauté internationale et Idriss Déby Itno, incarnation d’un nationalisme africain qui se réveille subitement. Comparé à l’entente cordiale qui avait caractérisé les rapports entre ces deux présidents, dans le cadre de l’opération au Mali, c’est vraiment illustratif du fait que chaque opération a des règles qui lui sont spécifiques. Aussi bien du côté tchadien que de celui français, on s’efforce de faire en sorte que ce désaccord n’éclate pas au grand jour. Les personnalités des deux pays qui s’expriment, usent à propos, de termes à la fois subtiles et convenus. Mais, il est clair que N’Djaména et Paris ne sont plus sur les mêmes longueurs d’onde concernant la situation en RCA.

Divergences par milices « Séléka » et « Anti-Balaka » interposées

La première manifestation de cette relative divergence s’est faite par milices interposées. Consciente du rôle qu’Idriss Déby Itno a joué dans la chute du général François Bozizé, en venant en aide aux rebelles de la Séléka, Paris s’est stratégiquement donnée pour priorité, de désarmer les ex-rebelles. Au passage, elle a implicitement relativisé le sentiment de vengeance qui habitait la communauté chrétienne de la Centrafrique. Il en a résulté des violences inouïes contre la communauté musulmane. Mais là aussi, Paris n’a pas eu une réaction à la hauteur des violences. Naturellement, N’Djamena n’a pas apprécié.

Procédant lui aussi subtilement, Idriss Déby a fait en sorte que ses soldats ciblent un peu plus les milices anti-balaka. Quand cela était possible, les soldats tchadiens ont même usé de stratégies déguisées, pour que certains rebelles de la Séléka, ne soient pas désarmés. L’origine de la mésentente avec les soldats burundais, doit d’ailleurs certainement, se situer à ce niveau.

Paris contre N’Djaména ?

Mais cette rivalité franco-tchadienne à propos de la situation en RCA, vient également de s’exprimer à un niveau plus élevé qu’est le Conseil de sécurité des Nations unies. En effet, alors que François Hollande, confronté à une situation sécuritaire qui ne cesse de se dégrader à Bangui, mais aussi dans plusieurs autres villes de la RCA, cherche désespérément à trouver de l’aide, voila qu’Idriss Déby Itno s’oppose catégoriquement à l’envoi des casques bleus que Paris appelait de ses vœux!

Conscient que ces nouveaux soldats pourraient déséquilibrer le rapport de force actuel en sa défaveur, le président tchadien opte plutôt pour le statu quo. Mieux, damant relativement le pion aux autorités françaises, il réussit à délocaliser le prochain sommet sur la crise centrafricaine à N’Djamena.

En panne d’initiatives et plutôt esseulé, François Hollande n’a eu qu’à se « plier ». Le temps d’un moment qui pourrait être très éphémère! Cela rappelle la légende David contre Goliath.

Boubacar Sanso Barry pour GuineeConakry.info

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